Eiji Yoshikawa – La pierre et le sabre
857 pages, Editions J’ai Lu
Quelle lecture !
La pierre et le sabre est le premier tome d’une œuvre dédiée à Miyamoto Musashi, meilleur bretteur qu’ait connu le Japon. Le second tome s’intitule La parfaite lumière.
Tout commence sur un champ de bataille. Deux amis se relèvent après l’affrontement de Sekigahara : Takezo et Matahachi. Dès les premières pages, on sent que les deux adolescents n’ont pas le même caractère. Takezo est un enfant de la campagne qui bouillonne intérieurement. C’est une tête brûlée pleine de vitalité. Matahachi est plus faible moralement. On sent qu’il peut se laisser aller à des idées noires.
Durant le trajet de retour au village, un événement sépare les deux amis. Takezo parvient à revenir et rencontrera Otsu, jeune fille promise à Matahachi. Osugi, la mère de Matahachi, remue alors ciel et terre pour retrouver son fils. C’est une femme au sale caractère, qui tient Takezo pour responsable. Pour elle, ce n’est qu’un voyou qu’il faut chasser.
Takezo est le personnage principal du livre, celui qui deviendra Miyamoto Musashi. Ce nom n’est pas anodin car il reprend celui du village de Miyamoto. Pour l’autre moitié, je vous laisse découvrir.
Musashi n’aura de cesse que d’améliorer son art du sabre. Il va sillonner le Japon pour rencontrer les maîtres de différentes écoles réputées. Souvent, il va les affronter et ainsi peaufiner sa technique.
On suivra donc son parcours et ses interrogations. Musashi est très dur envers lui-même. Colérique, nerveux, il peine à maîtriser toute la sauvagerie qui coule dans ses veines. Durant ses premiers affrontements, il sortira victorieux grâce à la force brute. Mais pour lui, vaincre de la sorte importe peu. Chaque fois, il remet son art en question.
Cette quête de perfection isole Musashi. Dévoué à sa cause, il refusera toujours les avances faites par les femmes. Ces dernières le trouvent très séduisant. Grand, fort et mystérieux, il dégage un charisme qui ne les laisse pas indifférentes. Plusieurs fois, Musashi recroisera Otsu pour qui il voue un amour sincère. Mais il sait que s’il s’abandonne à la vie de couple, il ne pourra jamais vraiment développer sa technique. Aussi la repoussera-t-il à chaque fois.
Matahachi est l’inverse de Musashi et sombre dans la déchéance. Il aime le saké, les femmes, et passe une bonne partie de son temps à errer sans but précis. L’ombre de sa mère, Osugi, plane constamment au-dessus de lui et il ne parvient pas à se libérer de son emprise. Perturbé et faible, Matahachi se laisse également dominer dans ses relations conjugales. Aussi passera-t-il quelques années aux côtés d’une femme à laquelle il se soumettra. Pour tenter de sauver la face, Matahachi se fera aussi passer pour Sasari Kojiro, un autre samouraï réputé qui deviendra le rival direct de Musashi.
Dans ce livre, l’univers du Japon est parfaitement retranscrit. Les différents endroits visités sont bien décrits et on appréciera la qualité de certains passages qui relèvent de la poésie. L’un des moments forts est quand Musashi se rend compte de la puissance de l’art de la peinture. Il porte ce regard admiratif et conscient sur les oeuvres d’un vieil homme. En extase devant la qualité du rendu, il considère alors ses propres estampes comme minables. Ainsi, chaque observation le renvoie à lui-même, et souvent l’auto-critique est violente. En cela, Musashi est assez torturé mais aussi très intelligent.
Les personnages secondaires ne sont pas en reste, comme Jotaro, l’enfant intrépide qui accompagne Musashi pendant une bonne partie du voyage. Il y aussi Otsu, Osugi, Akemi, le moine Takuan et bien sûr Kojiro… Il y en a d’autres et finalement, si j’ai pu les confondre au départ, on se familiarise assez rapidement avec.
Au final, j’ai adoré ce premier tome. C’est un pavé, écrit serré, pas de saut page entre les chapitres. Mais quel régal ! Je n’ai pas trouvé de longueur. Le rythme est bon, les dialogues nombreux, ce qui pour moi rend le récit plus vivant. Si vous cherchez un roman de cape et d’épée à la sauce nipponne, foncez !
Vous l’aurez compris, j’aime l’univers du Japon médiéval et particulièrement le code des samouraïs.
Au gré de mes lectures, j’ai découvert le traité des cinq roues écrit par Miyamoto Musashi. C’est assez philosophique mains instructif.
Fan de mangas, je conseille également Kaze No Sho de Jiro Taniguchi ou encore Miyamoto Musashi de Shotaro Ishinomori.
Benoît.
Eiji Yoshikawa – La pierre et le sabre
857 pages, Editions J’ai Lu
ISBN n° 978-2-290-30054-1